BLOGS ET JOURNAUX INTIMES

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Amiel, exhibitionism si bloguri

FÉVRIER 2006
BLOG DE LAURA
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Cel mai prolific scriitor de jurnal (din lume, probabil, desi pentru asemenea afirmatii nu poti niciodata sa bagi mana in foc) a fost un tip care se numea H.F.Amiel, si care a produs un jurnal intim de 46 de volume a cate cca. 300 de pagini fiecare.
Bietul om, depresiv si schizoid, privea probabil scurgerea subtila a timpului cu o rara disperare si traia chinuit de procrastinatie congenitala, adica de mania amanarii si de imposibilitatea de a actiona in vreun fel.
Criza reprezentarii identitatii personale e un subiect consubstantial cu tema jurnalului, autobiografiei si chiar literaturii autofictionale. In ce mod ma ajuta sa ma reprezint/cunosc/inteleg mai bine faptul ca scriu intr-un jurnal?
In discutiile liceale (si postliceale... hai:) era redundanta discutia despre valoarea si scopul acestui tip de scriitura. Opinia majoritara era ca desi oficial jurnalul e secret, nimeni nu poate scrie in el fara sa-si reprezinte o alta persoana, in afara sa, drept cititor. Altfel de unde atata exigenta stilistica, de unde atata prudenta in confesiuni si de unde atata apetenta de a fi "intr-un fel anume"- coerent intotdeauna cu sine.
Sigur ca ne putem fi propriul public, dar cati dintre noi oare isi pot fi un public atat de exigent?Aici intervine noutatea pe care o aduce blogul, ca fenomen. De-aici probabil si isteria din jurul lui. Era impudic sa-ti dai jurnalul la citit. Teoretic, jurnalul era secret. Practic...
"Gratia" ideii de blog sta tocmai in renuntarea la ipocrizia asta.Poti sa scrii despre tine, pentru tine si pentru ceilalti. Nu, nu te ajuta sa te re-cunosti, decat in masura in care iei pulsul reprezentarii pe care ceilalti o au despre tine.
Te simti liber, da. Poti sa te exprimi, e spatiul tau si faci ce vrei cu el. Un spatiu public si privat in acelasi timp.
Ma intreb ce s-ar fi intamplat daca Amiel ar fi prins moda asta. Cu siguranta n-as mai fi inceput postul de astazi cu el. Si nu pentru ca n-ar mai fi scris la fel de mult, ci pentru ca ar fi devenit un b(l)ogat si celebru (pentru ca apropos era si un scriitor talentat) copywriter...
Traduction en français

L'écrivain de journal le plus prolifique (du monde probablement, mais on ne peut jamais mettre sa main à couper pour de telles affirmations) fut un type qui s'appelait H.F. Amiel, et qui a produit un journal intime de 46 volumes d'environ 300 pages chacun.
Le pauvre homme, dépressif et schizoïde, regardait probablement le passage subtil du temps avec un désespoir rare et vivait tourmenté par la procrastination congénitale, c'est à dire par la manie de l'affliction et l'impossibilité d'agir d'une quelconque manière.
La crise de la représentation de sa propre identité est un sujet consubstantiel au thème du journal, de l'autobiographie et même de la littérature autofictionnelle. De quelle manière le fait d'écrire un journal m'aide-t-il pour mieux me représenter/connaître/comprendre ?
Dans les discussions au lycée (et après le lycée…allez :) la discussion sur la valeur et le but de ce genre d'écriture était redondante. L'opinion majoritaire était que même si au départ le journal est secret, personne ne peut l'écrire sans se représenter une autre personne, en dehors de lui-même, le lisant. Sinon comment expliquer une telle exigence stylistique, une telle prudence dans les confessions et une telle désespérance de se représenter " d'une certaine façon " - toujours cohérent avec soi-même.
Evidemment, on peut être son propre public, mais combien parmi nous peuvent être leur propre public avec une telle exigence? C'est ici qu'intervient la nouveauté du blog comme phénomène. D'où probablement l'hystérie autour. Donner son journal à lire pouvait paraître impudique. En théorie, le journal était secret. En pratique…
La nouveauté de l'idée du blog consiste exactement dans le renoncement à cette hypocrisie. On peut écrire sur soi-même, pour soi-même et pour les autres. Non, cela ne nous aide pas à nous re-connaître, sauf dans la mesure où l'on prend le pouls de la représentation que les autres ont de nous.
On se sent libre, oui. On peut s'exprimer, c'est notre espace, on peut faire ce qu'on veut avec. Un espace publique et privé en même temps.
Je me demande ce qui serait arrivé si Amiel avait vécu cette mode. Je n'aurais sûrement pas commencé le blog d'aujourd'hui avec lui. Et pas parce qu'il n'aurait plus écrit autant, mais parce qu'il serait devenu un copywriter riche* et célèbre ( car à propos il était également un écrivain talentueux)...
* Jeux de mots dans le texte original roumain avec b(l)ogat : blogat = blogué et bogat = riche.