Publié le 26 novembre 2005 - © Tribune de Genève - www.tdg.ch
Dynasties genevoises

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Les Droin
par Benjamin Chaix

Venus de Bourgogne en 1585,
ils ont flirté avec l’Angleterre
mais sont toujours restés fidèles
à Genève.


Anna Droin / CIG-BPU


L'un des sens du mot dynastie
est «suite de personnalités dans une même famille». Quand ces personnalités sont aussi typiquement genevoises que les membres de la famille Droin, leur présence s'impose dans notre série. Ils sont horlogers, commerçants, pasteurs ou juristes, et comptent même un banquier et une botaniste.

Autant d'activités exercées par les descendants d'un cardeur de laine de Beaune, venu se réfugier à Genève en1585. A la fin du XVIe siècle, la Bourgogne a fourni de nombreux réfugiés huguenots à la petite république réformée. «On trouve encore des Droin, des Drouin et des Drouhin en Bourgogne, dont certains produisent du très bon vin», précise Jacques Droin. «La mention la plus ancienne du nom est celle de Droin le moineau dans Le roman de Renart», ajoute l'ancien juge à la Cour, fin lettré qui édite actuellement le correspondance de Rodolphe Töpffer.

A Genève, le premier Droin peigne la laine, l'un de ses fils aussi, tandis que l'autre passe tout naturellement à la fabrication des vêtements. Sera-t-on tailleur d'habits de père en fils ? Pas longtemps, car vient un Isaac Droin, qui se spécialise dans la passementerie. Nous sommes déjà au début du XVIIe siècle et les Droin n'ont toujours pas acquis la bourgeoisie de Genève. Descendants d'un réfugié reçu habitant en 1585, ils figurent au nombre des «natifs» et de ce fait resteront privés de droits civiques jusqu'en 1792.

Ils se rattraperont avec le banquier César Droin (1801-1867), membre en 1842 du premier Conseil administratif de la Ville de Genève, et avec les députés au Grand Conseil César Droin (1871-1963) et Antoine Droin, né en 1959, fils du pasteur Jean-Marc Droin.

Lapidaire et pasteur
L'Angleterre, où deux générations de Droin naîtront sous le règne de la reine Victoria, avait déjà tenté Jaques Droin (1713-1777), lapidaire à Londres. Son arrière-petit-neveu Denis Droin (1804-1858), frère du banquier déjà cité et du pasteur Moïse Droin (1806-1897), obtient la naturalisation britannique en 1847. Il épouse une Ecossaise, Mary-Ann Kerr, et six de leurs sept enfants naissent à Londres. «Il parlait et écrivait, dit-on, quatorze langues modernes et anciennes», rapporte son descendant direct. «L'une de ses filles, mariée avec un Russe, fut la mère de l'historien Ivan Lapchine, cité par Soljenitsyne dans L'archipel du Goulag », ajoute Jacques Droin.

Grâce à William, fils de Denis, la famille Droin se perpétue aujourd'hui à Genève. «William Droin avait fait de mauvaises affaires à Londres», explique son arrière-petit-fils. «C'est vraisemblablement pour cette raison que sa femme et lui ont délégué l'éducation de leur fils César à un oncle et une tante de Genève. Ce garçon n'avait que 12 ans quand sa tante Julia Cherbuliez née Droin et son mari sont venus l'attendre en 1883 à Calais pour l'emmener avec eux à Genève.»

Le petit Ceasar

Le petit Ceasar (il orthographiait son prénom à l'anglaise) deviendra l'avocat César Droin, bâtonnier, député au Grand Conseil, avocat conseil du consulat de Grande-Bretagne à Genève. Le premier de ses fils, William, sera à son tour avocat, tandis que le deuxième, Jules, deviendra médecin. L'un des fils de ce dernier, Jacques Droin, né en 1926, sera avocat, juge au Tribunal, puis à la Cour de justice, et enfin à la Cour de cassation. Il est le père de Sylvie Droin, avocate, puis substitut du procureur général , procureur et juge au Tribunal.

«A propos de mon père et de ses frères», fait remarquer Jacques Droin, «on peut dire que les trois fils de César ont épousé trois filles d'Auguste. Leurs femmes avaient pour père l'une Auguste Boissonnas, l'autre Auguste de Morsier et la troisième Auguste Naville.» Le tableau de la famille Droin ne serait pas complet sans Kitty (1830-1879), botaniste distinguée, auteur d'un herbier qui appartient au Conservatoire et Jardin botaniques , et surtout sans sa cousine et belle-soeur Anna (1840-1912), l'éphémère et unique fiancée de Henri-Frédéric Amiel. Souvent citée dans le célèbre Journal intime du professeur genevois, Anna Droin, dite Perline, fille du pasteur Moïse Droin, épousera en 1871 son cousin Henri Droin, fils du banquier César Droin.

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