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Le Mont Gosse


Le mont Gosse se situe à Mornex, un grand village qui fut un lieu de cure très couru grâce à sa situation de micro climat. Décrivant Mornex, Henri-Frédéric Amiel nota: « On n’entend que le bruit de la mouche qui bourdonne. Ce calme est saisissant. Le milieu du jour ressemble au milieu de la nuit ». Sur le même sujet voici un passage du poète Gaudy-Le Fort, dont la belle demeure de commerçant enrichi est devenue la mairie d’Onex: « Amis, voilà Mornex! c’est là qu’on se repose, c’est là que chaque jour prend une teinte rose, c’est là que le génie admire et se recueille, qu’à l’album de sa vie on ajoute une feuille... ». De nombreuses personnalités viennent y séjourner pour jouir de la douce quiétude campagnarde, à deux pas de la grande cité de Genève. Richard Wagner y séjourne pendant 2 mois pour soigner son eczéma en l’été de 1856 après avoir composé, son chef d’oeuvre la Walkyrie (les Walkyries étaient des divinités féminines de la mythologie germanique qui accueillaient au paradis les héros morts au combat). John Ruskin, peintre, critique d’art, sociologue et écrivain anglais, séjourne à Mornex en 1862-3.

Après 1798, la réunion de Genève à la France ouvre sans entraves le pays du Salève aux habitants de la nouvelle préfecture du Léman. Henri–Albert Gosse, né à Genève en 1753, possède une pharmacie à Longemalle. Les Genevois le rencontrent souvent dans leurs rues, reconnaissant sa traditionnelle houppelande grise, ses cheveux longs et son gourdin de montagnard qu’il tient en main. Les Savoyards qui viennent les jours de marché se servir chez lui, le consultent sur toutes choses. En 1802, le pharmacien Gosse achète une propriété à Mornex qui se situe au sommet d’un éperon boisé qu’un vallon sépare du Petit Salève et qui domine toute la vallée de l’Arve jusqu’à Bonneville. Au sommet de la colline, dans les ruines d’un château, il construit un chalet qui reflète bien ses goûts et dans cet ermitage qu’il appelle « Mon Bonheur » il passe de longs séjours. Son épouse, Louise Agasse, femme cultivée, sensible et patriote, secondée par son frère, assure la bonne marche de l’officine, tandis qu’il se laisse absorber par des préoccupations plus élevées que celle de ses bocaux.

En 1812, Gosse qui est un fervent disciple de Jean-Jacques Rousseau, décide d’élever un temple dédié aux « grands hommes », à l’endroit de sa propriété où la vue est la plus étendue et d’où l’on jouit d’un panorama incomparable dont le Mont-Blanc forme le centre. Il place dans ce temple les bustes que lui modèle son fils, des grands naturalistes suisses comme Bonnet ou Haller, mais aussi ceux de Linné, Rousseau ou de Saussure. Depuis quelque temps déjà, il nourrit l’ardent espoir de réunir dans cette retraite, tout ce que la Suisse compte d’illustres naturalistes, afin qu’ils viennent échanger leurs idées et qu’en présence des grands savants, ils puissent « s’électriser ». Pour cela, il se met en rapport avec l’un de ses amis bernois, le pasteur Samuel Wyttenbach, lequel va l’aider à élaborer cette rencontre. Après quelques hésitations dues à la barrière linguistique et un report de date, suite aux enseignements que certains dispensent, la réunion a lieu le 6 octobre 1815.

Ce jour-là, une trentaine de savants, dont la moitié est venus de quelques cantons de la confédération et l’autre moitié de Genève, fondent la prestigieuse « Société helvétique des sciences naturelles ». Des statuts sont publiés, lesquels stipulent que tous les membres devront se réunir en ce lieu tous les cinq ans et que chacun devra faire l’objet d’une publication de ses travaux. Peu après, ladite société étend ses effectifs à quelques membres étrangers et compte plus de cinquante adhérents. Vers la fin du 18e siècle ceux qui s’adonnaient à l’étude de la nature étaient principalement des ecclésiastiques, des médecins et des pharmaciens. Henri-Albert Gosse ne se réjouira malheureusement pas longtemps de cette initiative, puisqu’il décédera moins de quatre mois plus tard, le 1er février 1816. Son corps repose à Plainpalais et son coeur, embaumé, placé dans une urne de marbre noir, a été déposé dans sa propriété, sur le mont qui porte désormais son nom. En 1988 la « Société helvétique pour les sciences naturelles » devient « l’Académie suisse des sciences naturelles » dont le Secrétariat est à Berne.
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David Viry
Association Genevoise des Amis du Salève
(AGAS),