Henri-Frédéric Amiel craignait la
perte de son journal : "A l'éblouissement
pénible que j'ai ressenti en ne retrouvant plus le
N° 13 de ce Journal, j'ai pu mesurer
le chagrin que me ferait la perte de ce manuscrit de
6.000 pages. Ce serait dix-sept ans de vie
retranchées à peu près de ma
mémoire, car ces feuillets intimes sont presque
mes souvenirs eux-mêmes. Qu'un incendie, un
déménagement, un accident quelconque
m'enlèvent ce coffre, et je me sens diminué
dans mon âme, amoindri dans mon être,
mutilé, appauvri, dépouillé
irrémédiablement. Ceux qui impriment et
publient n'ont pas ce danger à craindre. Le
meilleur d'eux mêmes est sauvegardé; ils
sont sous la protection publique. Leur vie à pris
corps. Elle est invulnérable. Pour moi, je puis
être détruit presque tout entier ". ( p.445,
vol. V )
Grâce à Vladimir Dimitrijevic, Amiel est
désormais invulnérable. Les 173 cahiers du
Journal intime sont devenus 12 volumes,
sauvegardés, "sous la protection publique" comme
dit Amiel.
Mais une autre forme de sauvegarde est la
numérisation. Quel serait son avantage ?
L'épopée d'Internet et de la
bibliothèque numérisée est
évoquée dans la présentation
citée en titre.
Pour le Journal intime d'Amiel, qui
constitue avec ses 15644 pages une véritable
banque de données et dans laquelle se retrouve la
quasi-totalité de l'oeuvre d'Amiel, on imagine
sans peine la facilité avec laquelle il serait
possible de rechercher des textes, créer des index
de tout genre, trouver des citations, établir des
suites chronologiques, lire de courts extraits, etc...
etc... grâce
aux liens hypertextes
De l'avis de plusieurs responsables de
bibliothèques nationales, les deux formes
d'édition sont complémentaires plutôt
que concurentes, et dans le cas de l'édition
intégrale qui est encore en librairie, cette
banque de donnée annexée à
l'édition sur papier, serait plutôt un atout
supplémentaire.
Il suffit d'essayer de lire un ouvrage d'une centaine de
pages sur son écran d'ordinateur pour savoir qu'un
livre "en ligne" ne remplacera jamais un livre "en
papier".
Les extraits du Journal intime d'Amiel en 2
volumes publiés par Edmond Scherrer en 1884 ont
été numérisés et
proposés sur Internet en avril 1998 par un
éditeur privé (Jean-Pierre ARBON, ancien
Directeur Général de Flammarion de 1988
à 1997) qui a malheureusement disparu du
réseau en 2002 sans avoir assuré la
pérénité de son travail pour se
lancer dans une nouvelle
carrière dans la chanson française
!
Pour se faire une idée de l'avantage que
représenterait la numérisation du
Journal intime, il faut consulter la
traduction
en anglais publiée en 1885 par Mrs Huphry Ward
(qui était la tante d'Aldous Huxley), qui a eu la
chance d'avoir été numérisée
dans le cadre du projet Gutenberg.
En janvier 2005, avec "Google
Print", le plus important moteur de recherche sur
Internet a lancé un gros pavé dans la mare
des bibliothèques nationales européennes.
Techniquement les 12 volumes pourraient être
numérisés en une dizaine d'heures.
L'éditeur se dit ouvert à toute
suggestion...
Qu'en pensent les lecteurs d'Amiel ?
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